June ▬ Comme si de rien n'était.

On était au environ de midi lorsqu'il poussa la porte du petit café restaurant où June et lui aimaient se rendre pour être plus tranquille. Il fallait bien se le dire : la cafétéria de la fac était parfois insupportable. La matinée avait été un peu speedée et il avait besoin de calme. Ou plus exactement, il avait envie de calme. Il aimait s'assoir dans un coin et observer ce qui se passait autour de lui. Sourire qu'il voyait deux vieilles femmes radotaient au coin d'une rue, se demandait ce que ce type pouvait bien attendre de l'autre côté de la route, regarder les gens passer et se dire "je connais, je connais pas...".
Il passa devant le comptoir et alla s'installer dans un coin de la pièce, face à la fenêtre. Il avait énormément faim mais ne savait vraiment pas ce qu'il allait commander. Un serveur qu'il ne connaissait pas (encore), un nouveau probablement, s'approcha de sa table :
— Vous avez choisis ?
— Hum, une assiette de coquillettes avec du parmesan, s'il vous plaît, répondit-il avec un sourire. Des pâtes, des pâtes, des pâtes, toujours des pâtes, comme dirait June. C'est vrai qu'Aryen était un (très) gros mangeur de pâtes. Selon lui, il n'y avait rien de plus facile et d'aussi simplement bon à manger. Il n'était pas vraiment compliqué : pour lui faire plaisir, faites lui des pâtes.
Le serveur, Jason (c'était écrit sur son badge, épinglé à sa chemise) nota la commande sur son petit calepin et repartit au moment où le téléphone d'Aryen se mettait à vibrer. C'était un message du cousin : « Hey Ary, on sort ce soir, n'oublie pas. Swa. » Ça, c'était encore un plan foireux comme chaque plan qu'organisait Swayne. Aryen ne pris même pas la peine de répondre puisque de toute façon, il n'avait pas le choix. Il serait contraint de suivre son cousin. Il sourit à cette pensée. Après tout, il l'avait ramené d'Australie, il fallait qu'il l'assume.

Jason revint avec son assiette de coquillettes au parmesan et après l'avoir remercié, Aryen se mit à manger en regardant par la vitre la rue qui commençait à s'animer pour le déjeuner. June ne lui avait pas donné de nouvelles depuis un petit bout de temps et il espérait bien la croiser ici, sauf si elle l'évitait. Après tout, pour lui, ça ne changeait pas grand chose, elle était bourrée, il ne prenait pas ça pour argent comptant. Ils étaient amis depuis leur plus jeune âge, ça ne pouvait surement pas être un incident de ce genre qui allait changer ça.
Il réfléchissait trop, elle le faisait toujours trop réfléchir. Il se posait rarement autant de question qu'avec elle, vraiment. La porte du café s'ouvrit une énième fois, le nouveau venu faisant teinté le carillon.

Il était encore en train de rêvasser et de penser à des choses sans queue ni tête lorsqu'elle apparut devant lui, comme par enchantement et lui dit :
— Des pâtes, des pâtes, des pâtes, toujours des pâtes.
Il sourit, de ce petit sourire en coin qui mélange à la fois amusement et contentement et pencha un peu la tête sur le côté.
— June ! Cheeseburger-frites et coca ! Non ?
Il était vraiment content de la revoir mais il n'oserait pas lui avouer, ni même se l'avouer. Il jeta un bref coup d'œil vers la porte d'entrée du restaurant. Elle aurait tout aussi bien pu repartir et il ne s'en serait même pas aperçue. Il poussa un soupir de soulagement avec le plus de discrétion possible. Il passa au dessus de la table et l'embrassa sur le front. Puis il se rassit, pris un autre fourchette de coquillettes et ajouta :
— Alors, quoi de neuf, ma dolcezza ?
Il ne savait pas trop quoi dire, il ne voulait pas aborder des sujets susceptibles de tout faire capoter. Ou plus exactement, il ne voulait pas qu'elle pense ou que ce repas donne l'impression qu'il y avait quelque chose de changer entre eux. Il voulait que ça fasse comme si de rien n'était. Il ne voulait pas que ça ait de l'importance, ni pour lui, ni pour elle. C'était un situation étrange et ces pensées n'avaient de cesse de radoter. Et plus il y pensait et plus il se disait que finalement si, ça avait changé quelque chose mais il n'arrivait pas à mettre le doigt dessus, à lui donner une dénomination exacte et claire. « Tu réfléchis toujours trop, Aryen ! Stop. »
Il attrapa un morceau de pain dans la corbeille et l'observa un moment. Il allait lui en proposer un bout mais on mange rarement du pain avec un hamburger alors il s'abstint. A la place, il fit un cercle avec les quelques coquillettes qui lui restait et lui demanda :
— Tu fais quoi, ce soir ? Swayne a encore imaginé un plan foireux. J'ai peur de m'y aventurer seul...
Sur ces derniers mots, il afficha un vrai sourire, plein et entier, cette fois et lui fit un clin. Elle devait en savoir un rayon sur les idées périlleuses de son cousin. Ça ne lui faisait jamais froid aux yeux, à elle. Aryen, lui, se souvenait d'un soir qui avait finis en garde à vue et préférait rester sur ses gardes. Et puis, quand elle venait avec eux, il était plus facile pour lui de rester calme et de se contrôler. Une autre réflexion lui traversa l'esprit mais il préféra ne pas s'y attardait. Il repris à manger en attendant une réponse.